Selon l’enquête menée par l’OCCRP sur le Rwanda, Paul Kagame aurait utilisé le logiciel Pegasus, fabriqué par la société israélienne NSO Group, pour espionner des dignitaires congolais ainsi que plusieurs autorités du Burundi et de l’Ouganda.
L’« Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) », le consortium des journalistes d’investigations qui enquêtent sur différentes zones géographiques et sur différentes thématiques comme la corruption ou le crime organisé, a découvert dans la liste de la firme israélienne NSO Group – une société israélienne de « cybersécurité » qui vend des logiciels espions aux gouvernements du monde entier – que le gouvernement rwandais de Paul Kagame aurait utilisé les services de Pegasus pour espionner des personnalités politiques et militaires de haut rang des pays voisins dont ceux de la République Démocratique du Congo (RDC).
Plusieurs numéros de téléphone de personnalités de premier plan en République Démocratique du Congo, en Ouganda et au Burundi figurent dans les données de la société israélienne NSO Group. Or on sait que le Rwanda a eu des relations glaciales avec ces voisins au fil des années : Il a parrainé des groupes armés dans l’est de la RDC ; a critiqué l’Ouganda pour abriter des milices anti-FPR ; et a été accusé par le Burundi de comploter pour renverser son président.
En RDC, l’OCCRP a identifié dans la base de données de la société israélienne NSO Group des numéros de l’ancien ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Lambert Mende et d’Albert Yuma, PCA de la Gécamines et la Fédération des Entreprises du Congo, deux proches de l’ancien président Joseph Kabila.
Les journalistes ont également trouvé un numéro appartenant à Jean Bamanisa Saïdi, l’ancien gouverneur des riches provinces aurifères de l’ex-province Orientale et de l’Ituri. Ces numéros avaient été sélectionnés lors de la crise électorale de 2016 où l’on se demandait si Joseph Kabila respecterait les limites constitutionnelles de son dernier mandat.
Plusieurs autorités en Ouganda
Du coté Ougandais sur cette liste, figurent des personnalités comme Ruhakana Rugunda ; le premier ministre ougandais jusqu’au mois dernier et des numéros appartenant aux membres de longue date du cabinet ougandais comme celui du ministre des Affaires étrangères, Sam Kutesa. Il y a aussi celui de David Muhoozi, l’ancien général en chef des forces de défense ; Joseph Ocwet, l’officier supérieur du renseignement ; et la figure de l’opposition Fred Nyanzi Ssentamu. Les numéros sélectionnés ont coïncidé avec une visite de Kagame en Ouganda.
Parmi les Burundais de cette liste, l’OCCRP a identifié les numéros de téléphone d’Alain-Guillaume Bunyoni, le premier ministre du Burundi. Bunyoni avait été ajouté avant d’être nommé Premier ministre puisqu’il était ministre de l’Intérieur du Burundi.
« Il existe déjà une méfiance énorme et fondée entre les gouvernements de la région des Grands Lacs et le Rwanda », a déclaré la journaliste et auteur Michela Wrong auteure d’un ouvrage sur le Front Patriotique Rwandais de Paul Kagame et les crimes dont il est accusé. « [La preuve d’espionnage] encouragera certainement l’opinion selon laquelle le Rwanda n’est pas un partenaire qui respecte les règles. »
Contacté par le consortium, les porte-parole de la RDC et du Burundi ont refusé de commenter sur ces révélations. Celui du gouvernement ougandais, Ofwono Opondo, a déclaré qu’il appartenait « à l’Ouganda de renforcer ses protocoles de cybersécurité, puisque le monde est plein d’espions et d’espionnage, même entre alliés ».
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